Lundi matin,
Je serai, ce soir, a Samarqand. Mille fois j'ai reve de prononcer cette phrase, mille fois, j'ai vu Tamerlan mettre un terme a ses conquetes et massacres pour m'y accueillir en frere et me baigner les pieds, mille fois imagine mes chameaux, charges de soieries, baraquant a l'abri des murailles, mille fois entendu le glouglou des fontaines et senti sous mes pieds, le soyeux des tapis alors que le soleil couchant faisait flamber les coupoles turquoise.
Je serai, ce soir, a Samarqand. J'y arriverai emousse; comme tous les jours depuis Bakou, mon univers se sera contracte, au fil de la journee, pour s'abstraire du paysage. Une couche de poussiere se sera, lentement et insidieusement, incrustee dans mes bagages, deposee sur mes yeux et sur mon coeur.
Je serai, ce soir, a Samarqand, fatigue, sec, ne me restera de l'etape du jour, qu'un peu d'energie pour sourire, plonger mon regard dans les yeux de celui qui m'accueillera et rire avec lui, s'il le faut, de mes maladresses.
Pourrai-je, un jour, me pardonner d'ecrire que, ce soir, a Samarqand, l'enorme porte cloutee du caravanserail, qui protege les richesses du pillage et les reves des petits garcons de la lassitude, aura moins d'attraits qu'une paillasse, n'importe ou et qu'une bouteille de coca-cola,


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